Page:Soulié - Les Mémoires du Diable, 1838, tome I.djvu/98

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moi, malheureuse ? et de quoi ! mon Dieu ? je suis riche, je suis jeune, je suis belle, n’est-ce pas que je suis belle ? vous me l’avez dit, Armand. Qu’est-ce donc qu’une femme peut envier avec de tels avantages ?

— Rien, assurément. Cependant…

— Cependant ! reprit la marquise avec une impatience nerveuse : elle serra les poings avec vivacité, se mordit les lèvres, et, se contraignant à grand’peine, elle continua : — Voyons, Luizzi, ne soyez pas comme les autres, ne me poursuivez pas de questions, d’observations, de doléances, parce que j’ai quelque pensée qui m’occupe ; vous savez qu’il faut bien peu de chose pour contrarier une femme ; mais je vous ai invité à souper, soupons.

Ils se mirent à table, et la marquise servit Luizzi ; elle était manifestement troublée, elle était gauche.

— Vous avez du champagne près de vous, lui dit-elle.

— M’en laisserez-vous boire seul ?

Elle hésita ; puis tendit son verre, et le vida