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Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/123

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La muse me chercha, fier, jeune, pur encor,
Et dit : — « Qu’à tes accents tout se prosterne et change !
« La lyre a des rayons du glaive de l’archange.
« Viens, viens régénérer ce siècle sans vigueur,
« Qui se pétrit un Dieu des fanges de son cœur.
« Allume tout ton sang pour rajeunir ses veines ;
« Et comme si la peste, aux immondes haleines,
« Se fût prostituée à son embrassement,
« Remplace par le mien son impur vêtement !

« L’amour s’en va des cœurs ; tout l’homme n’est que cendre.
« La mort, en le frappant, n’a plus rien à lui prendre.
« Il porte sur ses yeux, où nul flambeau ne luit,
« Les lourds aveuglements de l’éternelle nuit.
« Il transforme en néant la parole divine.
« Le froment dans son sein fait germer la famine.
« Et maître de nos sens, l’égoïsme glacé
« Tient chaque astre de l’âme à son ombre éclipsé.

« Comme aux jours où le Christ dressait un grand exemple,
« Viens, ose déchirer tous les voiles du temple.
« Combats les noirs venins du rêve qui nous mord ;
» Change l’eau de la source où nous buvons la mort.
« L’humanité t’attend sur son lit de souffrance ;
« Viens, appuyant la lyre au cœur de l’espérance,
« Régner sur une terre où le génie est roi,
« Où la fleur de la vie a ses parfums en toi.

« Console et raffermis. Laisse, penseur austère,
« Leur rire impitoyable aux stances de Voltaire.
« Qu’il parle avec le luth ou la toile ou l’airain,
« Comme un regard de Dieu, l’art est grave et serein.