Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/146

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Bientôt, plus près de lui, la trombe tourbillonne.
Diminuant la mer pour bâtir sa colonne,
Le prodige terrible, en ses humides flancs,
Élargit les fureurs de ses orbes roulants.
Il envahit l’espace, et ses ondes hautaines
Du navire, à ses pieds, voient ramper les antennes.
Mais le navire tonne, et le géant marin
Reçoit au cœur le choc de cent globes d’airain.
Chaque boulet lancé sur la trombe écumeuse,
Privant d’un arc-en-ciel sa ceinture brumeuse,
Disperse dans les airs son magique appareil :
D’un voile de fumée il la cache au soleil,
Et le long de ses flancs, par vingt blessures blanches,
Fait écouler sa vie en larges avalanches.
Et toujours le vaisseau verse, à coup plus pressé,
Sa foudre intarissable à l’ennemi blessé.
De la trombe, à grand brait, s’écroule enfin la masse ;
Le fond de l’Océan remonte à sa surface,
Et son sein paternel dans ses flots bleus reprend
Sa gigantesque fille épanchée en torrent.
C’est ainsi que l’enfer, après la grande lutte,
De Satan dans son ombre avait caché la chute ;
Et, tel que le vaisseau vainqueur du haut écueil,
Idaméel voguait sous le vent de l’orgueil.

Mais, parfois égaré dans de sombres alarmes,
Et portant dans ses yeux des abîmes de larmes,
On voyait, pâle et seul, le triste souverain
Parcourir du regard, sur trois tables d’airain,
Sa grande histoire à lui que l’enfer ne peut lire,
Que sa main, jour à jour, voulut jadis écrire,
Pour l’emporter après, n’importe dans quel lieu :