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Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/202

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Un soir, la lune au ciel se levait large et blanche ;
Les loxias chantaient, balancés sur la branche
Du palmier dont les airs alentour s’embaumaient ;
Sous le souffle de Dieu les fleurs des prés dormaient ;
Oui, les dernières fleurs ! .. — « O Sémida ! lui dis-je,
« L’Arar étale en vain son fertile prodige ;
« Ce globe de clarté d’où descend la fraîcheur,
« Voit pâlir, chaque nuit, sa rêveuse blancheur,
« Et s’apprête à fermer dans l’éternel nuage
« Le cercle que traçait son lumineux voyage.
« Peut-être dès demain la lune doit périr !
« As-tu donné ton cœur à ce qui va mourir ?
« Oh ! si je t’avais vue, alors que la nature
« Sous l’œil vert du printemps dénouait sa ceinture,
« Quand des premiers soleils tout prenait la couleur,
« Quand la fleur de l’amour sur cette terre en fleur
« Venait, ô Sémida ! de ses esprits de flamme
« Embaumer chastement la jeunesse de l’âme ;
« Et que des frais jasmins les berceaux odorants
« De leur exil d’Éden consolaient nos parents !
« Oh ! si je t’avais vue, alors que sans orage
« La vie en tourbillons volait sous chaque ombrage ;
« Montait du sein des bois en hymnes frémissants,
« Rendait jaloux les dieux de notre terre absents,
« Et couronnant ses fils d’acanthe et de délice,
« Baignait leur lèvre en feu des eaux de son calice !
« Sémida m’eût aimé…. Près des sources du jour,