Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/242

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« Se livrant, sous mon arc, leur bataille frivole,
« Les partis, rallumés au vent de la parole,
« (Lâches dissensions dont mon ombre a gémi)
« Songeaient à tout combattre… excepté l’ennemi !
« Oubliant que l’Europe, une main sur la lance,
« N’admettait qu’à regret leur poids dans sa balance ;
« Qu’on ne pardonne pas à qui nous fit trembler,
« Et qu’il faut être grand, lorsqu’on veut ; s’isoler !

« Les âges reculés du vieux globe où nous sommes,
« Ont vu souvent le Nord, le Nord fabrique d’hommes,
« Passer sur notre Europe en torrents populeux,
« Ne laissant que le nom d’un désastre après eux.
« Mais le torrent des czars fut une mer profonde
« Qui sut rendre éternel chaque pas de son onde,
« Et déborda sur nous, sans que jamais le temps
« Enlevât une écaille à ses léviathans.
« Aux limites du globe adossée et durcie.
« Colosse de frimas, la sauvage Russie,
« Prise dans ses glaçons comme en un grand réseau,
« Se souvint du Caucase où posa son berceau ;
« Fit un pas, et bientôt, conquêtes solennelles,
« Ouvrit sa bouche avide à l’air des Dardanelles ;
« L’air enivrant et chaud dans son sang fermenta.
« Au cœur de l’Orient un seul bond la jeta,
« Elle crut à son sort et devança l’histoire.
« Ce fut un éléphant monté par la victoire,
« Qui, fier d’avoir courbé sous ses pesantes lois
« La Perse où je voulais exiler ses exploits,
« Revient vers l’Occident avec ses tours guerrières ;
« Sa trompe de l’Europe arrache les barrières ;
« De son ciel despotique il nous porte la nuit.