Le sauvage oreiller autour du grand front chauve
Débordait et semblait, voilant le cou nerveux,
Sur le crâne du saint remplacer les cheveux ;
Et puis venait mêler sa teinte nuageuse
Aux longs flots épanchés de la barbe neigeuse.
A l’entour du vieillard, dans l’ombre, au loin volait
Une vapeur d’encens que nul feu n’exhalait.
Il rassemble son souffle et sa force dernière.
Orgue où durant cent ans a vibré la prière,
Sa poitrine palpite, et cherche encor des sons
Pour des hymnes d’amour sous les mortels frissons.
C’est le chant triomphal que l’agonie entonne ;
Le désert attentif avec moi s’en étonne.
Et tout le ciel répond à l’hymne fraternel
De ce cygne écouté par le cygne éternel ;
A ce chant des adieux qui flotte, et puis retombe
Où l’espérance luit pour enchanter la tombe.
J’admire en réprouvé l’éclat de cette mort ; ,
Ce miroir d’une vie où n’est point le remord !
J’observais les progrès de la béatitude…
Quand, tout à coup, changeant de voix et d’attitude,
Le mourant, au Seigneur dernier prêtre resté,
Se dressa pour bénir son pain d’éternité.
La grotte resplendit de ces pâques funèbres !
Le soleil de la foi levé dans ces ténèbres,
Couronna le vieillard, lévite d’Israël,
Dont la mort tarissait le calice du ciel ;
Et sa fille à genoux, sa fille désolée,
Courbait plus bas encor sa tête échevelée.
Tandis que le lion, en pleurs pareillement,
Puisait sa part de vie en son recueillement…
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