Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/289

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Lui donnant pour rival dans cette grande guerre,
Au lieu de Lucifer un archange vulgaire !

Et moi je t’aime encor ; de lui-même effrayé,
Dans mes pleurs corrosifs mon cœur gémit noyé.
D’une infidèle mort quand je ne puis t’absoudre,
Quand tu fuis nos amours sur l’aile de la foudre,
Je t’aime, et dans mon sein triste et sans avenir,
Sous l’ongle du malheur se tord le souvenir.
Moi qui ne te vois plus je demande aux étoiles
Si je les rallumai pour te servir de voiles !
Je demande au matin, dans son vol arrêté,
S’il éteint, sous mes pleurs, son hymne à ta beauté !
Et j’ouvre encor mes bras et, pour moi, ton image
Brille sur chaque écueil de mon vaste naufrage,
Et je prête l’oreille à l’adieu suborneur
Que jette en ricanant ce spectre du bonheur.
Mesurant ma douleur à ton indifférence,
Je m’obstine à souffrir de la même souffrance ;
Quand de ton Éloïm les cieux te sont ouverts,
Je mêle ton image à l’espoir des enfers !

Sur ce globe désert je n’ai plus rien à faire,
Mon génie a besoin de changer d’atmosphère.
Mourons, puisque la tombe est l’unique chemin
Qui puisse replacer un sceptre dans ma main.
Mourons, puisque l’enfer, quand cette terre expire,
Offre à mon désespoir la chance d’un empire.
Ainsi que Sémida, le sort est inconstant.
Vaincu par le Très-Haut, je puis vaincre Satan,
Et le bruit de sa chute, en la céleste enceinte,
Ira porter mon nom à la nouvelle sainte.