Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/291

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Je reconnus en eux, pâles et gémissants,
Princes dépossédés, les trois esprits puissants
A qui Dieu confia, comme un père sa fille,
Cette terre naissante et sa grande famille ;
Et qui, depuis ce jour, n’avaient jamais quitté
Ce globe dans l’espace avec eux emporté.

Sémida ne vit plus, ils perdent leur empire.
Chacun des trois esprits et s’arrête et soupire,
En voyant à ses pieds, sous ses longs cheveux d’or,
Cadavre immaculé qui semblait vivre encor,
La douce Sémida, leur ineffable amie.
On aurait cru la vierge en leurs bras endormie,
Quand le groupe divin, plus pâle à son aspect,
Souleva ce beau corps avec un saint respect ;
Frissonnant de pudeur, en ces heures funestes,
En touchant une sainte avec des doigts célestes.
Leur écharpe d’azur, tissue au firmament,
Vint, suaire béni, couvrir ce front charmant,
Ce sein qui ne bat plus sous les plis funéraires.
Comme une sœur portée au cercueil par ses frères,
Deux soutenaient sa tête, et l’autre ange attristé
Ses pieds resplendissant de leur virginité.
Je vis le groupe saint de loin, se mettre en marche
Vers un roc de l’Arar qui s’entr’ouvrait en arche.
Et là, s’agenouillant en pleurs, il déposa
La sainte en un tombeau que le lion creusa ;
Le lion qui, captif sous la roche prochaine,
En entendant gémir avait brisé sa chaîne ;
Et, pour veiller encor sur un autre cercueil,
S’était joint tout aveugle à la pompe du deuil.