Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/328

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Caïn vient le premier, courbé sous la grande ire,
Ayant son droit d’aînesse au dévorant empire.
Caïn, ce laboureur du seigneur rejeté,
Dont le crime en deux parts scinda l’humanité,
Et qui dans ses sillons, pour sa récolte amère,
Perpétua le fruit qu’avait cueilli sa mère.
Hagard et vagabond, il cache dans son sein
Sous une peau d’hyène un bras droit d’assassin ;
Mais il ne peut cacher, et nul âge n’efface
Le signe que la main de Dieu mit à sa face.
Et regardant de près le prophète ou le roi :
« C’est Abel, cria-t-il, qui redescend vers moi,
« Lui, l’enfant préféré du ciel et de mon père,
« A ce titre deux fois attirant ma colère ;
« Lui, pasteur innocent, plus doux que ses agneaux,
« Dont la massue un jour a fracassé les os.
« C’est Abel qui d’en haut vient, ayant Dieu pour guide,
« M’absoudre de ma haine et de mon fratricide.
« C’est Abel ! .. » Et ce cri court d’échos en échos,
Voix, dans la nuit, pleurant de l’abîme au chaos.

Puis vient Sémiramis, parricide immortelle.
Le sphinx par habitude a tremblé devant elle.
Trois diadèmes noirs, d’emblèmes dépouillés,
Pendent confusément à ses cheveux souillés.
Elle vient, le front bas : ce n’est plus cette reine
Dont le monde pour vivre a respiré l’haleine,
Cette Sémiramis dont la virile main,
Poussant d’un geste altier les pas du genre humain,
Rejetant les fuseaux comme une ignominie,
Tendait sur l’univers les fils de son génie,
Alors que l’Orient, ainsi qu’un encensoir,