Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/370

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L’impie ose enchaîner tes efforts innocents,
Jeune vierge ! aux soupirs chastes comme un encens ;
Vase de pureté tout embaumé de rose,
Et brisé sur l’autel où ta blancheur repose.

Autrefois dans la nuit, sur les monts d’Israël,
Un tigre a vu brûler l’holocauste éternel ;
Il s’approche en silence, il se dresse, il s’allonge ;
Son œil ardent comme eux, dans les feux sacrés plonge
Jusqu’à l’agneau fumant qu’il n’ose pas toucher.
D’un bond profanateur il franchit le bûcher ;
Il s’éloigne, il revient, mâche la proie absente ;
Effleure les brandons de sa griffe puissante ;
Et la douleur alors, pour la première fois,
Par delà les vieux monts jette sa forte voix.
Dans un cercle hurlant il enferme sa proie,
Et sa robe royale autour des feux ondoie ;
Et les reflets changeants de leur vive clarté
Illuminent de près sa sauvage beauté.
Ouverte aux vents du soir, sa narine plus grande
Hume, avec volupté, les vapeurs de l’offrande.
Il se décide enfin, s’élance, et sans effroi
Sur l’agneau flamboyant s’abat… Le monstre-roi
Dépouille l’autel, fuit vers sa caverne sombre.
De l’holocauste saint la chair gémit dans l’ombre.
S’étonnant d’un repas pour sa faim étranger,
A la table de Dieu le tigre vient manger ;
Déchire la victime, et, dans son antre immonde,
Appauvrit d’un agneau les prières du monde ;
Et du bûcher encor luisent les feux ardents
Sur les flocons de laine attachés à ses dents.
Tel, entraînant la vierge, et sur sa robe pure