Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/379

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Et de grands cercles noirs ont remplacé leurs gloires
Et leur glaive allumé jette des flammes noires,
Et, comme en un faisceau, rassemble dans leur main
Tous les coups dont la mort frappa le genre humain.
Glacés, il ne bat plus de cœur sous leur armure.
Tout le sang des martyrs baigne leur chevelure,
Même le sang du Christ qu’ils vinrent, à genoux,
Recueillir par torrents aux blessures des clous,
Lorsqu’au jour du Calvaire et de la grande attente,
Frappant du Dieu vivant chaque chair palpitante,
Sur le corps dont la robe était jetée au sort,
Leur glaive défaillant divinisait la mort !
Aussi triste aujourd’hui se lève leur phalange,
Dont l’ombre armée autour du saint des saints se range.

Les vierges, les enfants, ce beau groupe d’élus
Qui, dans les lys du ciel, repose et ne meurt plus,
Comme un nid de colombe en frissonnant s’envole.
Un nuage d’effroi court sur chaque auréole ;
Et Sémida raconte au ciel épouvanté
Son voyage à travers l’azur illimité,
Et du Christ descendu les paroles lointaines ;
Et ses pleurs ont coulé comme l’eau des fontaines ;
Et d’esprits en esprits la terreur va croissant ;
Et le martyr, caché sous sa robe de sang,
Craint de voir se briser dans l’ineffable enceinte,
Quelque lien d’amour de la famille sainte.

Seul sous les anges noirs Gabriel s’arrêta.
Il crut voir dans leurs yeux la nuit du Golgotha
Se lever ; il sentit éclore une pensée
Du fond de la tempête en son cœur amassée :