Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/60

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Clorinde dans la Jérusalem délivrée, sont des figures, des archétypes poétiques dont aucun objet réel n’a fourni le modèle ; créations exceptionnelles de l’art, douées de traits aussi caractéristiques que tout ce qui marche et vit sous nos yeux, existences à part qui n’ont pas besoin d’avoir leur degré marqué sur l’échelle des êtres. Le génie a soufflé sur l’image, l’image a vécu.

Elle a vécu, parce qu’elle était belle ! L’instinct du beau, cette conscience de l’artiste, ne doit jamais l’abandonner. Le beau est une manifestation de la pensée divine ; et l’art, en se vouant à son culte, devient, pour ainsi dire, l’auxiliaire des sentiments religieux. Je ne sais quel philosophe ayant appris que le fils d’Agrippine avait fait transporter l’Apollon du Belvédère dans une des salles du palais d or, s’étonnait que la contemplation de ce marbre n’eût pas changé l’âme de Néron.

On trouvera dans cet ouvrage peu d’allusions aux intérêts passagers qui nous travaillent. L’inspiration, en se mêlant à la politique, se dépouille presque toujours de sa sérénité. Elle doit savoir s’isoler de cette curiosité vulgaire qui s’attache aux événements contemporains. La Poésie, c’est la couronne d’Hiéron : son or ne souffre point d’alliage ; c’est le diamant du lapidaire, on l’estime à sa pureté.

Mais en me séparant de toutes les passions du siècle,