Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/85

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De ta création la vivante merveille.
Oh ! comme, au fond du ciel, le cygne en feu s’éveille,
Lorsque trois chérubins, sous leur doigt frémissant,
Tournent tous les feuillets du livre éblouissant !
On les voit rayonner d’ardente poésie,
Plus que de diamants le front d’un roi d’Asie,
Ces pages, ces beaux vers dans l’Éther déployés :
Mots de là langue humaine aux élus envoyés !
Ces vers majestueux faits d’accords et de flamme,
Trouvés pour que la voix d’un ange les déclame ;
Ces vers triomphateurs et tout-puissants… ces vers
Où resplendit le jour qui créa l’univers !!

Le char d’Emmanuel, fier de ses grandes guerres,
Aux tableaux de Milton vient compter ses tonnerres ;
Et, lui parlant du haut de ses brûlants essieux :

« Le regard infini remplaçait donc tes yeux,
« Toi, qui de nos exploits mesuras le théâtre !
« Aveugle de la muse, où m’as-tu vu combattre ?
« Quel habitant du ciel t’inonda de clarté ?
« Quand ta harpe chantait, qui de nous a dicté ?
« Qui t’a dicté ce vers qu’après la haute lutte,
« Satan vient allonger des neuf jours de sa chute [1] ?
« Et celui dont la courbe embrasse tant de flots,
« Pont de la mort joignant les deux bords du chaos ? »
Le poète triomphe… et toi, tu viens entendre
De ton premier réveil le récit chaste et tendre,
Belle Eve ! et tu revois l’Éden que tu perdis,
Dans ces chants inspirés des anges applaudis.
Oh ! contemple longtemps, contemple, avant l’orage

  1. Nine times the space that measures day and night