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Page:Soury - Le système nerveux central, 1899.djvu/176

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LE SYSTÈME NERVEUX CENTRAL

Il n’y a pas jusqu’aux hallucinations autoscopiques ou spéculaires dont on ne retrouve l’observation clinique chez AnrisroTe. C’est encore ANïI-PHÉRON d’Orée qui en est le sujet. Après avoir dit que la vision semble se réfracter dans tous les corps lisses, dans l’eau, dans l’air, quand il est condensé, le Stagirite ajoute que la faiblesse seule de la vue suffit pour que l’air produise cette réfraction, comme il arrivait souvent à ce malade, dont la vue était mauvaise et d’une acuité très faible : « Il lui semblait toujours voir sa propre image qui le précédait et qui le regardait en sens contraire de lui (1) ». Ce phénomène, qu’ArisToTE attribue ici à un affaiblissement de la vue, affection d’ailleurs secondaire à la maladie mentale d’ANTIPHÉRON, est une hallucination véritable : c’est la vision de sa propre image. GoETHE a éprouvé cette hallucination (2), bien étudiée aujourd’hui par les aliénistes (3).

Le somnambulisme n’a guère été mieux décrit que dans les paroles suivantes d’ARISTOTE, où ce phénomène est étudié chez l’animal et chez l’homme. Les vagues réveils inconscients du long sommeil des nouveaunés font comparer ceux-ci à des êtres qui sentent et vivent en dormant (4) : Les animaux ont des sensations même quand ils dorment, συμδαίνουσι γὰρ καὶ αθεύδουσιν αἰσθήσεις Toïs ws :s, et ce ne sont pas seulement des réves (ë6rvx) ; mais, outre les rêves, il arrive qu’ils font beaucoup de choses sans rêver, ainsi que ceux qui se lèvent en dormant. Il y a en effet des gens qui se lèvent en dormant et marchent, les yeux tout grands ouverts, comme les gens éveillés ; ils ont très bien la sensation (xoôroi) de tout ce qui arrive autour d’eux ; pourtant ils ne sont pas éveillés ; ils ne sont pas davantage en état de rêve. Les enfants, à cause de leur habitude de sentir et de vivre en dormant, semblent en quelque sorte ne pas savoir qu’ils sont éveillés : rx Gè madix éoixacv, Gonep ἀνεπιστήμονα τεῦ nf

(4) Meteor., ILE, 1v, 3. ei γὰρ εἴδωλον ἐδόχει προηγεῖσθαι βαδίζοντι αὐτῷ ἐξ ἐναντίας βλέπον πρὸς αὐτόν.

(2) Gæœrar. Mémoires. « .... Quand, de mon cheval, je lui tendis encore une fois la main (à Frédérique), les larmes lui roulèrent dans les yeux, et je n’élais pasému moins qu’elle. Je chevauchai alors sur le sentier qui mène à Drusenheim et je fus saisi du pressentiment le plus étrange. Je me vis moiméme, non pas des yeux du corps, mais de ceux de l’esprit, à cheval sur le même chemin, du côté opposé à celui où j’étais, et.dans un vêtement tel que je n’en ai jamais porté ; il était gris οἱ orné de quelques dorures. Silôt que je m’éveillai de ce rêve, l’image disparut. « Huit années après, porlant, non par choix, mais par un hasard singulier, le même habit que j’avais rêvé, je me trouvai sur le mème chemin, pour aller voir encore une fois Frédérique. « Quoi qu’il en soit de celle vision, ce fantôme merveilleux me procura quelque calme dans ce moment de séparalion..... »

(3) V. Féré. Note sur les hallucinations autoscopiques ou spéculaires et sur les hallucinations altruistes. CG. R. Soc. de biol., 18g9r.

(4) De an. gener., V, x, 778. Cf. le traité des Réves.