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Page:Soury - Le système nerveux central, 1899.djvu/184

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THÉORIE DE LA CONNAISSANCE

Matière et Forme.

On n’estime savoir une chose, dit Aristote, que lorsqu’on pense en connaître la cause première. C’est donc par la science des causes qu’on doit commencer l’étude du monde. Il y a quatre sortes de causes. La première est ce qu’on nomme la substance (ἡ οὐσία), la forme (εἶδος, μορφή, λόγος, τὸ τί ἦν εἶναι). La seconde cause est la matière et le sujet (τἡν ὕλην καὶ τὸ ὑποκείμενον). La troisième cause est le principe du mouvement (ὄθεν ἡ ἀρχὴ τῆς κινήσεως). La quatrième est la cause finale (τὸ οὗ ἕνεκα)[1]. La plupart des anciens philosophes n’ont considéré les principes de toutes choses que sous l’aspect de la matière : « Ce d’où sortent tous les êtres, d’où provient tout ce qui se produit et où aboutit toute destruction, la substance persistant, quoique subissant les changements déterminés par ses affections, voilà l’élément, le principe de tous les êtres. Aussi pensent-ils que rien ne naît ni ne périt véritablement, puisque cette nature première persiste toujours[2]. »

Pour Aristote la matière n’est certes pas un non-être, μὴ ὄν. Il ne place pas toutefois en elle la cause du mouvement ; elle n’est pour lui qu’un κινούμενον et un παθητικόν[3]. La matière est d’ailleurs inconnue par elle-même, en soi (en tant qu’indéterminée) : ἡ δ’ ὕλη ἄγνωστος καθ’ αὑτὴν[4]. Mais, quoique la matière soit ce qui n’a, de soi, ni forme, ni propriété, ni aucun des caractères qui déterminent l’être, en tant que sujet pouvant être déterminé elle subsiste et persiste par elle-même ; elle est impérissable, indestructible, incréée : ἡ ὕλη ἀγέννετος[5]. Il n’existe pas plus d’ailleurs de matière sans forme que de forme sans matière. Tout en insistant sur l’importance de la forme au regard la matière dans

  1. Métaphys. I, III, I. En d’autres termes : causa formalis, causa materialis, causa effciens, causa finalis. Cf. Phys., II, III.
  2. Mét. I, III, 2-3. ἐξ οὗ γὰρ ἔστιν ἅπαντα τὰ ὄντα, χαὶ ἐξ οὗ γίγνεται πρώτου καὶ εἰς ὃ φθείρεται τελευταῖον, τῆς μὲν οὐσίας ὑπομενούσης, τοῖς δὲ πάθεσι μεταθαλλούσης, τοῦτο στοιγεῖον καὶ ταύτην ἀργήν^φασιν εἶναι τῶν ὄντων’ καὶ διὰ τοῦτο οὔτε γίγνεσθαι οὐθὲν οἴουται οὔτε ἀπόλλυσθαι, ὡς τῆς τοιαύτης φύσεως ἀεὶ σωζομένης...
  3. De generat. et corrupt. τῆς μὲν γὰρ ὕλης τὸ πάσχειν ἐστὶ καὶ τὸ κινεῖσθαι...
  4. Métaph., VI, X, 13.
  5. Ibid., II, IV, etc.