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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/60

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notre vie de campagne.

connus, au travers de mon sommeil, et ils augmentent la sensation de bien-être que me donne mon petit lit, ainsi que le regret de le quitter.

Dormir une minute, rien qu’une minute !

Mais le pétillement de la flamme s’accentue dans le poêle, et devient un ronflement régulier et cadencé.

« Mademoiselle, il est temps de vous lever ! » retentit à mon oreille, et Douniacha me retire impitoyablement mes couvertures.

Au dehors, le jour commence à poindre, et les premiers rayons de soleil blafards d’une froide matinée d’hiver, joints à la lueur jaunâtre de la bougie, donnent à tout ce qui nous entoure un aspect morne et inanimé. Est-il rien de plus déplaisant que de se lever à la chandelle !

Je me mets sur mon séant, et commence machinalement ma toilette ; mais mes yeux se ferment involontairement, et ma main qui tient un bas, s’engourdit en le soulevant.

Derrière le paravent qui dissimule le lit de mon institutrice, j’entends déjà un bruit d’eau qu’on verse, et dans laquelle on se lave énergiquement.

« Ne flânez pas, Sonia ! si vous n’êtes pas prête dans un quart d’heure vous porterez l’écriteau de « paresseuse », sur le dos, pendant le déjeuner. »

Cette menace n’est pas une plaisanterie. Les punitions corporelles sont bannies de notre éducation, mais l’institutrice les remplace par d’autres moyens d’intimidation : si je me rends coupable de quelque faute, on m’épingle entre les épaules une bande de