Lundi 4 août (1914)
Quoique plein d’enthousiasme, c’est le cœur gros que j’ai embarqué à Marcoing avec Henri. On a beau dire, il est des adieux douloureux et il faut que la patrie soit quelque chose de sacré, de divin même pour que d’un seul coup, à son appel on lui sacrifie : fortune, affections, avenir, famille, vie.
Nous sommes embarqués, l’enthousiasme de la jeunesse qui règne partout, les camarades, la [illisible] Lapinière eurent tôt fait de dissiper la tristesse qui m’embrumait le cœur et c’est presque gais que nous arrivons à Lille.
Au quartier, c’est la fièvre, le brouhaha, en un mot le désordre le plus complet. On entre, on sort, on rencontre des connaissances, plus le temps de penser à rien. On ne sait où s’adresser, personne ne s’occupe de vous, c’est l’anarchie, sauf pour le régiment actif.
Nous passons deux jours au quartier et dehors. Sur ces entrefaites, le régiment actif part, au milieu de l’enthousiasme délirant de la population lilloise.