Page:Souvestre, Laurens de la Barre, Luzel - Contes et légendes de Basse-Bretagne.djvu/138

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Et elle fit comme elle disait. Mais il arriva que la barrique ne contenait plus que de l’eau trouble au lieu de piquette, de même que la cruche et le pichet.

La malheureuse allait peut-être courir après les voyageurs et implorer leur secours, en avouant ce qu’elle avait fait, quand son mari rentra ; mais ils ne surent que se quereller au lieu de s’en remettre à la bonté de Dieu, en sorte que l’eau sale demeura dans la buie et dans le baril, comme le trouble dans le ménage.

Les deux saints continuèrent leur route. À l’entrée d’un village, ils furent émus par des gémissements qui sortaient d’une chaumière. Ils s’y rendirent aussitôt, se disant qu’il devait y avoir quelque douleur à soulager. Une femme en larmes tenait sur ses genoux un petit enfant moribond. Il était pâle à faire peur, et en outre louche et contrefait à désespérer.

— Qu’a donc votre enfant ? dit l’un des voyageurs.

— Il a souffert cruellement, répondit-elle, et il va mourir, le pauvre petit… Hélas ! rien ne peut le sauver.

— Rien, fit saint Jean en montrant le ciel ; vous oubliez la bonté de Dieu.

— Oh ! reprit la mère, il est trop tard, c’est fini.

— Si votre enfant revenait à la vie, vous seriez heureuse,