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au bord du lac.

— Écoutez, reprit Cyrille.

Et il continua.

« Le roi Horsu avait enlevé l’enfant à Paris, afin de le dépouiller de riches joyaux qu’il portait, mais il n’a pu me faire connaître ses parents… »

Remy fit un brusque mouvement…

« Tout ce que j’ai pu apprendre de lui, reprit le religieux, c’est que l’enlèvement a eu lieu au parvis Notre-Dame, le jour de la Pentecôte.

« Tant que j’ai vécu, j’ai caché ceci, dans la crainte qu’en cessant de me croire son père, Remy ne me retirât son affection ; aujourd’hui je dois tout avouer pour la décharge de ma conscience.

« Et vu que je suis trop pauvre pour rien laisser à celui que j’ai aimé comme mon enfant, je l’adresse, avec cette déclaration, à mon savant cousin Cyrille, afin qu’il lui serve d’aide et de conseiller. »

Il y eut une pose après cette lecture. Le religieux, touché malgré lui, affectait de tousser pour cacher son émotion, tandis que Remy, bouleversé, regardait le parchemin sans pouvoir parler. Il y avait dans son trouble de la surprise, de la douleur, de l’attendrissement. En apprenant que le chevrier qui l’avait élevé n’était point son père, il lui sembla qu’il le perdait une seconde fois ; puis la crainte exprimée par le mourant lui revint tout à coup au cœur, et laissant couler librement ses larmes, il s’écria, comme si Jérôme eût pu l’entendre :

— Non, père Jérôme, je ne vous retirerai pas mon