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le chevrier de lorraine.

ceux qui avaient le droit de vouloir, d’agir ! Le frère Cyrille essaya en vain d’amortir cette ardeur et d’ajourner les recherches, Remy déclara qu’il ne pouvait attendre, qu’il sentait en lui une sorte de puissance invisible qui le poussait.

— Mais songe, malheureux garçon, que tu ne sais rien de ta mère que son nom ! disait le moine.

— J’irai partout, le répétant jusqu’à ce qu’une femme y réponde, répliquait Remy dans son exaltation.

— Et si elle te repousse ?

— Je lui offrirai des preuves.

— Mais les fatigues de la route, les dangers, les pièges qu’on pourra te tendre !…

— Vous oubliez, mon père, que j’ai pour moi la Vierge et Mars !

Cette dernière raison convainquit le frère Cyrille.

— Eh bien, tu partiras, dit-il enfin, mais pas seul ! Jérôme t’a confié à moi ; tu as vécu à mes côtés une année entière ; je ne te jetterai pas ainsi sans conseiller et sans appui au milieu de la mêlée ; nous irons ensemble, et je ne te quitterai qu’après avoir trouvé la dame de Varennes.

La permission du prieur fut obtenue sans peine ; car dans ces temps de révolutions la claustration des religieux eux-mêmes était loin d’être aussi sévère que dans les siècles précédents. Les intérêts, les passions, les nécessités les arrachaient souvent à leurs retraites pour les mêler aux débats humains, et la robe monacale flottait partout, à la cour, sur les champs de ba-