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au bord du lac.

Père Cyrille ; pour l’heure, nous voyons le royaume livré à deux peuples et à deux princes qui n’ont d’autre occupation que de se nuire : aussi nul ne peut-il dire quand finiront nos maux, si la Trinité elle-même n’en prend souci.

— Peut-être le moment de la miséricorde est-il venu, fit observer la femme, car une nouvelle Judith vient d’arriver pour le salut du roi Charles.

— Une nouvelle Judith ! répéta le moine étonné.

— Ne le savez-vous pas ? reprit son interlocutrice ; une fille qui se disait envoyée de Dieu est arrivée à Chinon dans le mois de février. Après l’avoir fait examiner par des évêques et par l’université de Poitiers, Charles l’a mise à la tête d’un secours qui se rendait à Orléans, et elle a fait lever le siège aux Anglais.

— Est-ce possible ! interrompit Remy.

— Si possible, qu’elle est elle-même à Loches, où se trouve maintenant le roi.

— Au nom du Christ ! partons pour Loches, mon père ! s’écria le jeune garçon en se levant ; c’est là qu’il faut arriver.

Leur hôtesse objecta les dangers de la route couverte de partis anglais, qui, depuis la défaite d’Orléans, ne faisaient quartier à personne. Mais le Père Cyrille lui répondit que Dieu, qui les avait protégés depuis trois mois, ne les abandonnerait pas. Elle voulut alors garnir de provisions la besace que portait le jeune garçon, et passa dans la pièce voisine pour remplir sa bouteille de cuir. Mais comme elle se diri-