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au bord du lac.

Une pièce d’or !… c’était plus que Frédéric n’avait jamais osé désirer ; c’était la réalisation de ses plus beaux rêves ! Le pauvre enfant se trouva si saisi de bonheur, que son trouble seul put témoigner de sa reconnaissance.

Deux heures après il était dans le petit jardin attenant à la maison d’Odile Ridler, assis sur un banc, et feuilletant avec une sorte d’enivrement des livres posés sur ses genoux ; on voyait mille espérances, mille projets d’avenir passer dans son regard !… Il était heureux pour la première fois !


§ 3.


Un soir d’été, après avoir quitté son atelier, Frédéric, selon son habitude, était allé s’asseoir dans le parterre de la bonne femme Ridler pour y étudier en repos, lorsque la nuit le força de fermer son livre. Ses pensées se portèrent alors naturellement sur l’objet qui l’intéressait le plus au monde ; il se demanda pour la centième fois ce que son frère avait pu devenir depuis quinze jours qu’il ne l’avait point revu ; il se rappelait avec douleur les dernières paroles de sa mère : — Restez unis dans cette vie comme vous l’avez été dans mon amour ; — et il se disait que, dans le ciel même, son bonheur ne pourrait être parfait, puisque sa dernière espérance avait été trompée. Au milieu de ce chagrin une consolation lui restait, il pouvait se rendre la justice qu’il n’avait rien négligé pour obéir