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l’apprenti.

lui ; mais tous ses efforts et toutes ses prières furent inutiles.

— À quoi ça me servira-t-il de savoir lire, pour filer du coton ? répétait celui-ci.

Frédéric dut renoncer à vaincre la paresse de son frère ; mais il continua, pour son compte, les études commencées. Il demanda instamment au chef de l’école à passer dans la première division, où il prit des notions d’écriture et de calcul, et à l’aide de son propre travail beaucoup plus que des explications qu’il recevait, il fit dans ces nouvelles connaissances des progrès aussi rapides que ceux qu’il avait faits dans la lecture.

Deux ans environ se passèrent de cette sorte ; M. Kartmann avait de nouveau augmenté sa paye.

Cependant les cours qui se faisaient à la fabrique ne s’étendaient point au delà de la lecture, de l’écriture et du calcul ; Frédéric aurait voulu étudier la géométrie, indispensable, comme il le savait, pour la mécanique ; malheureusement il manquait de livres et ne pouvait en acheter. Enfin le jour de la Saint-Georges arriva, et avec lui une joie inattendue pour l’orphelin : c’était la fête de M. Kartmann. Quand tous ses ouvriers et apprentis vinrent la lui souhaiter, il fit avancer Frédéric, et lui mettant une pièce d’or dans la main :

— Prenez, mon ami, lui dit-il ; c’est la récompense que je destinais à l’élève le plus studieux ; je suis heureux qu’elle ait été méritée par vous.