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l’apprenti.

malheur ; mais ce qui en est un véritable, c’est de ne pas vouloir s’y soumettre.

— Elle est amusante, ta nécessité ! bon pour toi qui remontrerais la sagesse au bon Dieu ; quant à moi, j’étais né pour être riche, et l’on aurait dû me faire apprendre cet état-là.

— Écoute, dit Frédéric, ce sont des choses bonnes à dire en plaisantant ; mais, tu le sais bien toi-même, tes plaintes sur ta position ne la changeront pas ; il faut donc l’accepter telle qu’elle est. Ce n’est point au repos que nous devons tendre, nous autres fils d’ouvriers ; notre but doit être de vivre sans avoir besoin de l’aumône du riche ; pour cela nous n’avons de ressources que nos bras. Le faible seul a droit de se plaindre ; car quand on a la force et la santé, le travail est facile.

— Ne t’ai-je pas dit, répliqua François d’un ton de mauvaise humeur, que j’avais été chassé de la fabrique ? À quoi donc me servirait l’amour du travail puisque je n’ai plus d’ouvrage ?

— Il y a à Mulhouse d’autres fabriques que celles où tu travaillais, et avec de la bonne volonté tu trouverais à t’employer.

— Oui, que j’aille de porte en porte demander si on a besoin de moi, n’est-ce pas ? c’est glorieux ce métier-là.

— Trouves-tu moins humiliant de tendre la main devant la charité du passant ? Mais puisque ces démarches te coûtent, je t’en épargnerai l’ennui. Demain