le regard et le sourire affamés des convalescents ; il allait enfin se lever pour s’approcher de la table quand un grand bruit se fit entendre au dehors. Jehan courut à la porte ; mais elle s’ouvrit brusquement avant qu’il eût pu la barrer et donna passage à une demi-douzaine de valets de meute, portant les armes du roi brodées sur la poitrine.
Tous étaient entrés bruyamment en demandant la maison du forestier ; mais à la vue de la table servie et du hochepot dont l’odorante vapeur parfumait la chaumière, ils poussèrent une exclamation de satisfaction.
— Pâques Dieu ! s’écria le plus vieux en roulant autour de son corps le fouet qu’il avait à la main ; nous n’avons plus besoin de la maison du forestier ; voici de quoi amuser notre faim jusqu’au soir.
— Sur mon âme ! c’est un chapon au gruau, ajouta un grand noiraud à l’air affamé, dont les narines, caressées par le fumet du hochepot, semblaient se dilater avec délices ; je me réserve l’aile droite.
— Moi, l’aile gauche, s’écria vivement un blondin qui s’était déjà emparé du meilleur escabeau.
— Moi, les cuisses, reprit le vieux.
— Moi, la carcasse, ajouta un quatrième.
— Doucement, mes maîtres, interrompit Jehan, dont la figure avait déjà repris son expression dure et hargneuse ; nous sommes trois ici qui voulons également notre part.
— Nous n’en avons pas trop pour nous-mêmes, fit observer le grand brun, qui avait déjà tiré son couteau.