Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/106

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néanmoins dans l’ordinaire de la vie. Bien des années se sont écoulées ainsi au milieu d’un épanouissement de cœur et d’une confiance qui empêchait la douleur, sinon de venir, du moins de rester. Certain de ne pas être seul, je reprenais bientôt courage, comme l’enfant qui se rassure parce qu’il entend, à côté, la voix de sa mère. Pourquoi ai-je perdu cette assurance des premières années ? Ne sentirais-je plus aussi profondément que Dieu est là?

Etrange enchaînement de nos idées ! Une date vient de me rappeler mon enfance, et voilà que tous mes souvenirs fleurissent autour de moi ! D’où vient donc la plénitude de bonheur de ces commencements ? À bien regarder, rien n’est sensiblement changé dans ma condition. Je possède, comme alors, la santé et le pain de chaque jour ; j’ai seulement de plus la responsabilité! Enfant, je recevais la vie telle qu’elle m’était faite, un autre avait le souci de prévoir. En paix avec moi-même, pourvu que j’eusse accompli les devoirs présents, j’abandonnais l’avenir à la prudence de mon père ! Ma destinée était un vaisseau dont