Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/107

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je n’avais point la direction, et sur lequel je me laissais emporter comme un simple passager. Là était tout le secret de ma joyeuse sécurité! Depuis, la sagesse humaine me l’a enlevée. Chargé seul de mon sort, j’ai voulu en devenir le maître au moyen d’une lointaine prévoyance ; j’ai tourmenté le présent par mes préoccupations d’avenir ; j’ai mis mon jugement à la place de la providence, et l’heureux enfant s’est transformé en homme soucieux !

Triste progrès et peut-être grande leçon ! Qui sait si plus d’abandon envers celui qui régit le monde ne m’eût point épargné toutes ces angoisses ? Peut-être le bonheur n’est-il possible ici-bas qu’à la condition de vivre, comme l’enfant, livré aux devoirs de chaque journée et confiant, pour le reste, en la bonté de notre Père divin.

Ceci me rappelle l’oncle Maurice ! Toutes les fois que j’ai besoin de me raffermir dans le bien, je retourne vers lui ma pensée ; je le revois avec sa douce expression demi-souriante, demi-attendrie ; j’entends sa voix toujours égale et caressante comme un souffle d’été! Son souvenir garde ma