— Je les ai vus une seule fois.
Il hocha la tête.
— Oui, oui, reprit-il ; pendant bien des années ils ont vécu là comme des loups dans leur tanière ; ça ne savait que travailler la terre, tuer le gibier et boire. Le père menait la maison : mais des hommes tout seuls, sans femmes pour les aimer, sans enfants pour les adoucir, sans Dieu pour les faire penser au ciel, ça tourne toujours à la bête féroce, voyez-vous ; si bien qu’un matin, après avoir bu trop d’eau-de-vie, il paraît que l’aîné n’a pas voulu atteler la charrue ; le père l’a frappé de son fouet, et le fils, qui était fou d’ivresse, l’a tué d’un coup de fusil.
Le 16 au soir. — L’histoire du vieux caissier m’a préoccupé tous ces jours-ci ; elle est venue s’ajouter aux réflexions que m’avait inspirées mon rêve.
N’ai-je point à tirer de tout ceci un sérieux enseignement ?
Si nos sensations ont une incontestable influence sur nos jugements, d’où vient que nous prenions si peu de souci des choses qui éveillent ou modifient ces sensations ? Le monde extérieur se réflète perpétuellement