Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/234

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ses pieds, sa tête repose sur la pierre ; elle s’est endormie les mains jointes, en murmurant une prière apprise dans son enfance, endormie de son dernier sommeil et elle fait son dernier rêve !

Elle se voit toute petite, forte et joyeuse enfant qui garde les troupeaux dans les friches, qui cueille les mûres des haies, qui chante, salue les passants et fait le signe de la croix quand paraît au ciel la première étoile ! Heureuse époque, pleine de parfums et de rayonnements ! rien ne lui manque encore, car elle ignore ce qu’on peut désirer.

Mais la voilà grande ; l’heure des travaux courageux est venue ; il faut couper les foins, battre le blé, apporter à la ferme les fardeaux de trèfle en fleurs ou de ramées flétries. Si la fatigue est grande, l’espérance brille sur tout comme un soleil ; elle essuie les gouttes de sueur. La jeune fille voit déjà que la vie est une tâche ; mais elle l’accomplit encore en chantant.

Plus tard, le fardeau s’est alourdi ; elle est femme, elle est mère ! il faut économiser le pain du jour, avoir l’œil sur le lendemain, soigner les malades, soutenir les faibles, jouer, enfin, ce rôle de