Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/93

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promis aux deux sœurs de les reconduire à la station de Bellevue : le convoi ne peut tarder ; je me hâte de remonter le sentier qui mène aux noyers.

Près d’arriver, j’entends des voix de l’autre côté de la haie ; Madeleine et Françoise parlent à une pauvre fille dont les vêtements sont brûlés, les mains noires et le visage enveloppé de linges sanglants. Je comprends que c’est une des jeunes ouvrières employées à la fabrique de poudre fulminante établie plus haut, sur les bruyères. Une explosion a eu lieu quelques jours auparavant ; la mère et la sœur aînée de la jeune fille ont péri ; elle-même a échappé par miracle et se trouve aujourd’hui sans ressource. Elle raconte tout cela avec l’espèce de langueur résignée de ceux qui ont toujours souffert. Les deux sœurs sont émues ; je les vois se consulter tout bas, puis Françoise tirer d’une petite bourse de filoselle trente sous qui leur restent, et les donner à la pauvre fille.

Je presse le pas pour faire le tour de la haie ; mais, près d’en atteindre le bout, je rencontre les vieilles