Page:Souza - Oeuvres completes T1et2.djvu/364

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Je voyais qu’il voulait m’occuper, et m’arracher à mes pensées ; mais je sentais aussi que je pouvais lui être utile, et que je lui faisais du bien. Toujours attentif à prévenir ses désirs, avant la fin du jour, malgré moi, je fus réellement tiré de mes rêveries ; et, pendant cette route, je ne songeai plus qu’à ce qui pouvait la lui rendre moins fatigante.

Il m’a dit qu’il n’avait pas été depuis vingt ans dans la terre où il me conduisait, parce qu’il y avait perdu son premier enfant. « Depuis lors, a-t-il ajouté, tu as été toute mon espérance ; aujourd’hui tu es mon unique consolation ; ne l’oublie pas… » — Il s’est arrêté. — « Mon fils, a-t-il repris tout ému, je te confie mes vieilles années ; tu peux encore me faire chérir la vie… Mais, sans toi que deviendrais-je ?… » Il a porté ses regards vers le ciel et m’a répété : « Il ne me reste que toi ; ne l’oublie pas. » Des larmes s’échappaient de ses yeux.

À ces mots, je l’ai pressé, contre mon cœur, en me promettant de me consacrer entièrement à lui… J’ai vu qu’il lisait dans mon ame ; car il m’a dit d’un air attendri : « Soyons quelque temps sans parler de ces