Page:Spaak - Kaatje, préf. Verhaeren, 1908.djvu/46

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C’est si loin ! Un espace si grand nous écarte
De toi, que j’en ai peur ! Mais il faut que tu partes
Gaîment ! Regarde, aucune crainte ne m’effleure,
C’est fini, et je suis contente !…

JEAN

C’est fini, et je suis contente !…Mais tu pleures ?

KAATJE

Hélas !…

JEAN

Hélas !…Sois raisonnable ! Allons ! Pour que je peigne
Autre chose que des blasons et des enseignes,
Pour que je sois un maître et non plus un manœuvre,
Il faut que j’aille apprendre à faire des chefs-d’œuvre !

KAATJE

Sans doute. Mais si l’on est sage en s’en allant,
Faut-il aller si loin pour avoir du talent ?
Ne peut-on pas, chez nous…

JEAN

Ne peut-on pas, chez nous…Mais c’est de la folie
Petite ! Ici ? Chez nous ? Quand on a l’Italie !
Écoute ; si, parfois, tu m’as vu pâle et triste,
C’est qu’elle m’obsédait, comme tous les artistes !
Kaatje, tu sais si j’aime mon art ! Eh bien, songe
Que pour les yeux d’un peintre, ici, tout est mensonge,