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Page:Spaddy - Colette, ou les amusements de bon ton, 1937.djvu/110

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et de satyres dans les bois ! Je rêve, vois-tu, de stupres inimaginables ! Il n’y a pas d’horreurs qui ne me tentent ! Pour un rien je serais sadique ! Il faudra qu’un jour, devant toi, je fasse jouir un homme à en crever !

— Tu divagues ! protestai-je, un peu inquiet de cette volubilité érotique, qui pourtant me portait rudement à la peau, sous l’excitation de ces images et du chaud relent d’alcool que son haleine me jetait au visage.

Elle haussa les épaules, alluma avec crânerie un havane, se versa un second verre de Chartreuse et dit dans une volute de fumée :

— Pourquoi que je divague ? Tu n’as pas pour deux sous d’imagination ! Si tu ne sais pas m’exciter, moi je te plaque ! Allons, donne ta queue, que je te la suce !…

— Tu ne vas tout de même pas ici…

— Non, je me gênerai !

— Voyons, là, devant cette femme qui nous guigne ?

Le salon s’était en effet vidé, et il n’y avait plus avec nous, en face de notre table, qu’une jolie blonde, élégamment mise et fort piquante dont j’avais observé, pendant tout le repas, qu’elle semblait faire de l’œil à ma maîtresse. Et depuis un instant, avec une effronterie souriante, elle braquait sur elle son face-à-main.

— Justement, dit Colette, c’est parce qu’elle