Page:Spencer - La Science sociale.djvu/159

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draient qu’il existe effectivement entre les phénomènes sociaux des rapports constants, mais que ce ne sont pas les rapports généralement supposés constants. Nous apprendrions aussi que nous sommes exposés à nous tromper lourdement, lorsque d’une caractéristique frappante nous prétendons inférer certaines autres caractéristiques. Pour nous aider à percevoir cette vérité, nous allons recourir à un procédé assez rebattu. Voyons ce que pourrait dire de nous un observateur désintéressé, vivant dans un avenir très-éloigné. Nous supposons ses appréciations traduites dans notre incommode langage.

« Tous les enfants savent, grâce aux figures dont on se sert dans l’enseignement, que depuis des milliers d’années l’excentricité de l’orbite terrestre a commencé à diminuer, ils savent que par une conséquence nécessaire, l’époque glaciaire qui a si longtemps rendu inhabitable une grande partie de l’hémisphère septentrional n’est plus à son point culminant ; mais tout le monde ne sait pas encore que dans plusieurs régions la retraite des glaciers a rendu accessibles des contrées longtemps ensevelies. Parmi les moraines, et sous de vastes accumulations de détritus, on a trouvé tantôt des ruines, tantôt des squelettes à demi-fossilisés, dans quelques endroits des documents écrits, qui par un merveilleux concours de circonstances favorables ont été assez bien préservés pour que certaines parties soient demeurées lisibles. De même que les céphalopodes fossiles amenés à la surface par nos machines automatiques à extraire les pierres, sont quelquefois assez complets pour qu’on puisse les dessiner avec la sépia fournie par leur poche à encre, de même, par une chance heureuse, une race d’hommes éteinte depuis longtemps nous a transmis une véritable secrétion de sa vie journalière, dont nous pouvons tirer la matière colorante destinée à peindre ces hommes tels qu’ils étaient. À force de persévérance, nos investigateurs ont découvert la clef de la langue imparfaitement développée qu’on parlait alors ; après des années de travail, ils ont pu grouper des faits qui nous donnent une légère idée des peuples étranges qui vivaient dans l’hémisphère septentrional pendant la dernière période anti-glaciaire. »

« On vient de publier un rapport qui se réfère à une époque