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Page:Spenlé - Novalis.djvu/218

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NOVALIS

sible et à la connaissance scientifique, il donne comme substrat une sorte de fluide magnétique, qui, à la manière d’une sensibilité diffuse, pénétrerait toutes les parties de la nature. Ce sens interne se révèle plus particulièrement dans certains états d’hypnose, où se trouvent momentanément suspendues les facultés volontaires de perception et où le sujet se laisse complètement pénétrer par le rayonnement fluidique et magnétique. Des communications magiques peuvent ainsi s’établir, en dehors des formes normales du temps et de l’espace. C’est ce que Mesmer appelait « le sommeil divinatoire ». Ici, disait-il, « le sens interne devient le seul organe des sensations… On peut dire que dans l’état de sommeil l’homme sent ses rapports avec toute la Nature. » Une « clairvoyance » particulière se développe alors. « Dans cet état de crise, ces êtres (les somnambules) peuvent prévoir l’avenir et se rendre présent le passé le plus reculé. Leurs sens peuvent s’étendre à toutes les distances et dans toutes les directions, sans être arrêtés par aucun obstacle. Il semble enfin que toute la Nature soit présente. »[1]

Une conception analogue, — peut-être même directement empruntée aux écrits de Mesmer, — inspire bon nombre des fragments de Ritter[2] et paraît aussi avoir influencé la pensée de Novalis. Il faut savoir que le magnétisme animal passait encore pour une science occulte, réservée aux seuls initiés. Or il ressort clairement de la préface des fragments de Ritter, — auxquels Novalis semble avoir collaboré, — que nous sommes en présence d’un de ces petits groupes d’occultistes, si fréquents en Allemagne à la fin du 18me siècle. Il n’y a là rien de surprenant : des savants comme Sœmmerring et Klaproth, des littérateurs comme Forster et l’histo-

  1. Ibid. p. 60.
  2. Ritter devint de plus en plus l’apôtre inspiré du somnambulisme, auquel il finit par convertir Schelling et toute la « Naturphilosophie » romantique. Novalis mentionne dans ses fragments, à différentes reprises, des expériences sur le magnétisme animal N. II, 1, p. 206 : « Thierischer Magnetismus Versuche mit Julie » et N. S. II, 1, p. 348 « Thierisch-magnetische Versuche.