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Page:Spenlé - Novalis.djvu/424

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NOVALIS DEVANT LA CRITIQUE

magination succède l’apologie du despotisme, sous sa forme la plus redoutable, du despotisme moral et religieux. Voilà les symptômes qui annoncent au sein même du protestantisme un catholicisme d’un nouveau genre, un catholicisme larvé, d’autant plus dangereux qu’il est plus indéfinissable et qu’il s’assimile les éléments de la culture moderne. « J’appelle romantiques les écrivains qui, avec les ressources de la culture actuelle, entrent en guerre contre l’Aufklærung et la Révolution et qui rejettent ou combattent le principe autonome de l’humanisme, dans le domaine de la science, de l’art et de la morale » (ibid. p. 10). C’est à peu près la même définition que proposait Noack, dans son étude sur Schelling : « Quiconque, après avoir été atteint par les premiers rayons d’une ère nouvelle, s’efforce de ranimer, avec les ressources de la culture moderne, les formes surannées et mortes, dans la littérature ou dans l’art, dans la religion ou dans la science, quiconque cherche à restaurer le passé au milieu d’une époque nouvelle, dans des conditions de vie entièrement changées, celui-là nous l’appelons un romantique. » (Noack. — Schelling und die Philosophie der Romantik, Berlin, 1859, I, p. 59).

Cependant une lente transformation des partis et par suite de l’opinion publique se préparait en Allemagne, à la suite de la Révolution de 1848. L’avortement du Parlement de Francfort porta un coup sensible à la bourgeoisie et détermina un recul subit des idées libérales au profit des idées nationales, patriotiques et unitaires. Ce passé historique et romantique, que certains croyaient pouvoir rayer d’un trait de plume, se révélait encore singulièrement vivace et il apparaissait qu’il occuperait une grande place dans le développement futur de la nation, dans le rêve impérial de l’Allemagne unifiée. L’ancien libéralisme s’émietta ; tandis que quelques esprits avancés, parmi les radicaux démocrates, s’orientaient déjà vers le socialisme, la grande masse des libéraux bourgeois ou bien retombait dans un indifférentisme politique complet, ou bien renonçait