Aller au contenu

Page:Spenlé - Novalis.djvu/445

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
57
LES COURANTS D’OPINION

Une étude plus sérieuse a été publiée par M. Saint-René Taillandier en 1851 dans la Revue de l’Académie des Sciences et Lettres de Montpellier (Mémoire de la Section des Lettres, 1834, p. I ss.). Novalis n’est ni un réactionnaire, ni un rationaliste, c’est un « illuminé », pour qui la philosophie et la religion se ramènent à une extase tout intime et individuelle. « Le résultat du mysticisme de Novalis, c’est l’enthousiasme et, disons-le franchement, le délire de la poésie » (op. cit. p. 14). M. Taillandier donne une longue et intéressante étude de Henri d’Ofterdingen. « La fleur bleue de Novalis, dit-il, — c’est le calice céleste dans lequel repose ce qu’il y a de plus élevé, de plus sacré au monde, l’amour, la poésie, l’intelligence claire et complète de tous les secrets de l’Absolu » (p. 27). Très finement le critique français compare la composition du roman à une partition musicale. « Les motifs légèrement indiqués dans l’Ouverture vont se répéter, se développer et remplir bientôt la partition tout entière » (p. 27). Par contre le Mærchen de Klingsohr et surtout la seconde partie projetée du roman lui paraissent relever de la pathologie mentale, plus que de la critique littéraire (p. 35, p. 36). — Cependant, dans l’ensemble, cette étude marquait un progrès, non seulement sur ce qui avait paru jusqu’alors en France, mais même sur la plupart des travaux allemands contemporains concernant le romantisme. « L’Allemagne actuelle — écrivait en terminant M. St-René Taillandier — ne juge pas Novalis : elle se venge. Irritée d’avoir succombé aux énervantes séductions du mysticisme, elle renie les maîtres qu’elle aimait hier. On reviendra nn jour sur ce jugement passionné » (p. 38).

À une époque récente seulement et presque contemporaine les idées romantiques allemandes ont pénétré on France dans la littérature du jour, — à la suite de la musique de Wagner, de la philosophe de Nietzsche et des drames de M. Hauptmann. Nombreuses sont du reste les affinités entre les Symbolistes français et les premiers roman-