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Page:Spenlé - Novalis.djvu/483

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LES PROBLÈMES

fidèle » se trouve dans le recueil mecklembourgeois de cantiques sous cette forme légèrement différente : « Si tous te renient, donne-moi de te rester fidèle. » « Et cela même — observe finement M. Heilborn — est significatif. Encore aujourd’hui et non sans raison l’orthodoxie luthérienne prend ombrage de cette glorification du vouloir personnel, qui sans cesse s’exprime à travers les cantiques de Novalis et aussi de cette altitude très indépendante du poète, qui s’isole de la multitude ignare et obtuse » (Novalis der Romantiker, op. cit. p. 123). Le même auteur explique ce caractère tout-à-fait indépendant et extra-confessionnel des Hymnes à Jésus par l’influence de Zinzendorf qui, comme on sait, en usait très librement avec les dogmes et reconnaissait à chacun la liberté de se faire à lui-même son « idiome » religieux particulier. Assurément cette influence est beaucoup plus réelle que celle de Schleiermacher, qu’ont cru devoir signaler jusqu’à présent la plupart des critiques. Cependant elle n’explique pas tout. Il se mêle au christianisme de Novalis des éléments — philosophiques ou théosophiques — qui sont entièrement étrangers au christianisme, historique et traditionnel. On peut, comme l’ont fait certains critiques, contester la valeur de ces éléments : il est impossible d’en nier l’existence. Et alors la question se pose inévitablement : quelle place le christianisme occupe-t-il dans cette philosophie religieuse plus compréhensive ? Le problème religieux dans Novalis dépasse donc de beaucoup la solution étroite qu’on a voulu lui imposer parfois.

4. La philosophie de Novalis. Déjà M. Dilthey avait posé le problème en termes plus philosophiques. « Marie, le Christ, la Résurrection n’étaient pas pour Novalis des articles de foi. On lui ferait injure, si on croyait qu’il ne voyait dans tout cela que des fictions poétiques. Aux heures d’émotion profonde, lorsque son regard se détournait du monde vers le ciel de la Nuit et de l’au-delà, alors dans le firmament obscur et chaotique se dessinaient pour lui ces constellations célestes, pareilles à des signes conducteurs,