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Page:Spinoza - Éthique, trad. Appuhn, 1913.djvu/661

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DE LA LIBERTÉ DE L’HOMME

espèrent être déchargés après la mort pour recevoir le prix de la servitude, c’est-à-dire de la Moralité et de la Religion, et ce n’est pas seulement cet Espoir, c’est aussi et principalement la Crainte d’être punis d’affreux supplices après la mort qui les induit à vivre suivant les prescriptions de la loi divine autant que leur petitesse et leur impuissance intérieure le permettent. Et, si les hommes n’avaient pas cet Espoir et cette Crainte, s’ils croyaient au contraire que les Âmes périssent avec le Corps et que les malheureux, épuisés par le fardeau de la Moralité, n’ont devant eux aucune vie à venir, ils reviendraient à leur complexion et voudraient tout gouverner suivant leur appétit sensuel et obéir à la fortune plutôt qu’à eux-mêmes. Ce qui ne me paraît pas moins absurde que si quelqu’un, parce qu’il ne croit pas pouvoir nourrir son Corps de bons aliments dans l’éternité, aimait mieux se saturer de poisons et de substances mortifères ; ou parce qu’on croit que l’Âme n’est pas éternelle ou immortelle, on aimait mieux être dément et vivre sans Raison ; absurdités telles qu’elles méritent à peine d’être relevées.