nous voulons ; de plus, comme elle est une espèce de tristesse, il faut l’éviter, ainsi que nous l’avons montré en traitant de la tristesse.
Je crois donc avoir assez montré et démontré que c’est seulement la foi vraie et la raison qui nous conduisent à la connaissance du bien et du mal. Et maintenant, si, comme nous le ferons voir, la première et principale cause de toutes ces passions est la connaissance, on verra clairement qu’en usant bien de notre entendement et de notre raison, nous ne tomberons jamais dans ces passions. Je dis notre entendement, parce que je pense que la raison[1] seule n’a pas assez de force pour nous délivrer en cette circonstance de toutes ces passions, comme nous le ferons voir en son lieu.
Cependant il est important encore de remarquer d’une manière générale que toutes les passions bonnes sont de telle nature que sans elles nous ne pouvons ni exister ni subsister, et par conséquent qu’elles nous appartiennent essentiellement, par exemple l’amour, le désir et tout ce qui appartient à l’amour.
Il en est tout autrement de celles qui sont mauvaises et aptes à détruire : non-seulement nous pouvons être sans elles, mais encore c’est seulement lorsque nous sommes délivrés d’elles que nous sommes ce que nous devons être.
Pour parler encore plus clairement, remarquons que le fondement de tout bien et de tout mal est l’amour, suivant qu’il tombe sur tel ou tel objet : car si nous n’aimons pas l’objet qui, avons nous dit, est le seul digne d’être aimé, à savoir Dieu, si nous aimons au contraire les choses qui par leur nature propre sont périssables, il s’ensuit nécessairement (ces objets étant exposés à tant d’accidents et
- ↑ Voir sur cette distinction la note ci-dessus, p. 20. (P. J.)