Page:Spoelberch de Lovenjoul - Les Lundis d’un chercheur, 1894, 2e éd.djvu/57

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30 LES LUNDIS D’UN CHEACIIEUE. Il La colonne de sauterelles que nous avions rencontrée dans la campagne passait sur la ville en ce moment, poussée par le vent du côté de la mer, où il s’en noyait par millions. Elles tombaient sur nos chapeaux avec un bruit de grêlons ; nos poches s’en remplissaient ; nous voulions prendre un sou, nous tirions une sauterelle par la cuisse ; elles nous en- traient dans le dos par l’hiatus de nos cra^ vates elles se cognaient à notre fi-ure comme des hannetons contre le carreau de la boîte qui les enferme. On aurait dit qu’on vidait du haut des maisons des milliers de paillasses, à voir voltiger en tourbillons ces fétus jau- nâtres, et rien n’était plus drôle que tous les passants qui se donnaient à eux-mêmes des multitudes de soufflets pour écarter ces essaims importuns. Nous prions nos lecteurs de croire que nous n’exagérons rien. Cela serait im- possible. Qu’il nous suffise de dire qu’une prime de quelques centimes par hectolitre de sauterelles détruites, étant accordée par le gouvernement, trente-trois mille francs avaient été payés déjà, sans diminuer en rien l’in- tensité du fléau.