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Page:Spoelberch de Lovenjoul - Les Lundis d’un chercheur, 1894, 2e éd.djvu/59

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52 LES LUNDIS D’UN CHERCHEUR. les mains d’un air de jubilation extrême ; puis il nous fit le salut oriental en répétant : Bono Bono ! » Le mauvais petit drôle s’éloigna, assez confus et grommelant quelques invectives contre nous. Il faut dire que les gamins français sont assez Turcs à l’égard des Arabes et ne leur épargnent guère les avanies. Et même ils sont imités en cela par des gens qui devraient être plus raisonnables et plus humains. On acquiert vite en Algérie une très grande légè- reté de main et de bâton. Ce sont ces petites injures de détail, aussitôt oubliées de ceux qui les font, qui fomentent dans le cœur de ceux qui les ont reçues des haines irréconciliables. La paix entendue ainsi nous fait plus d’enne- mis que la guerre. La plupart de ces bru- talités ont presque toutes le même motif. Le Français, et surtout le Parisien, ne peut jamais s’imaginer qu’on ne comprenne pas sa langue ; il donne avec cet idiome un ordre quelconque à un indigène qui, naturellement, prend un air rêveur et stupide, cherchant dans sa tête ce que le Roumi lui commande, et fait quelque chose au hasard pour lui prouver sa bonne volonté. Le Français élève alors le