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ACTE I, SCÈNE II.

SEMIDA.

Ma mère, ne me gâte pas, je t’en prie : un enfant doit être humble et modeste, et je crains de cesser de l’être, quand ta voix me fait entendre de si flatteuses paroles. Mais d’où vient que le saint prophète ne nous a pas visitées cette année ? Tous les printemps, à cette époque, il vient passer quelques jours dans ta maison ; tu m’as dit qu’il n’y avoit jamais manqué depuis ma naissance.

LA SUNAMITE.

Il arrivera peut-être aujourd’hui, ma fille ; c’est le premier jour de la lune de Sivan qu’il a coutume de s’établir sur le mont Carmel, au pied duquel notre maison est bâtie.

SEMIDA.

Je voudrais qu’il ne vînt pas aujourd’hui ; il n’aime pas les fêtes, lui ; il vit si solitaire ; il prie Dieu avec tant d’ardeur ! Son front austère, ses traits sillonnés par la vieillesse n’ont rien qui m’intimide ; je voudrois passer ma vie avec lui. Cet homme qui fait si peur aux méchans et que les bons abordent avec tant de respect, il daigne se faire entendre d’un enfant, et au fond de mon cœur je comprends tout ce qu’il dit.