Page:Staël - Réflexions sur le procès de la Reine, 1793.pdf/6

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donc seulement parler à l’opinion, analyser la politique, raconter ce que j’ai vu, ce que je sais de la Reine, et représenter les suites affreuses qu’auroient sa condamnation. Oh ! vous, femmes de tous les pays, de toutes les classes de la société, écoutez-moi avec l’émotion que j’éprouve ; la destinée de Marie Antoinette contient tout ce qui peut toucher votre cœur, si vous êtes heureuses, elle l’a été ; si vous souffrez, depuis un an, depuis plus long-tems encore toutes les peines de la vie ont déchiré son cœur ; si vous êtes sensibles, si vous êtes mères, elle a aimé de toutes les puissances de l’ame, et l’existence a pour elle encore le prix qu’elle conserve, tant qu’il peut nous rester des objets qui nous sont chers. Je ne veux prononcer aucune opinion politique, je craindrois de distraire, d’éloigner un seul intérêt de l’auguste personne que je vais défendre : républicains, constitutionnels, aristocrates, si vous avez connu le malheur, si vous avez eu le besoin de la pitié, si l’avenir offre à votre pensée une crainte quelconque, réunissez-vous tous pour la sauver ? Quoi, la mort termineroit une si longue agonie ! quoi, le sort d’une créature humaine pourroit aller aussi loin en infortune ! Ah ! mourrons, si cela est possible, n’existons pas dans un monde