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Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/314

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devait lui faire prendre la fuite — cette idée m’obsédait — il fallait m’écarter des chemins battus, où une rencontre pouvait me trahir.

Toutefois, après mûre délibération, mes notables pensèrent qu’il valait mieux aller droit au nord et gagner le Malagarazi, affluent considérable du Tanganîka, où il arrive du levant. Mais personne de ma bande ne connaissait la route, et le chef d’Imréra ne voulut permettre à aucun de ses hommes de nous servir de guide.

Suivant les indigènes, le Malagarazi n’était qu’à deux étapes. Je crus cependant nécessaire de donner à mes hommes des rations pour trois jours.

Itaga est situé dans le creux d’une montagne où il possède des champs d’une grande étendue. Ses habitants cultivent le sorgho, la patate, les haricots et le manioc, dont ils font du tapioca. Mais pas moyen d’y acheter un poulet à n’importe quel prix ; et la seule chose que nous pûmes nous y procurer, en dehors du grain, fut une chèvre d’une extrême maigreur, importée de l’Ouvinza, à une époque lointaine.

Le lendemain, 25 octobre, ne me rappelle que de mauvais souvenirs ; à dater de ce jour les difficultés reparurent.

Nous prîmes d’abord au levant pour gagner le plateau qui borne la vallée d’Imréra à l’ouest et au nord.

Le pied du plateau fut gagné en deux heures et demie ; nous nous y arrêtâmes. Une série d’escarpements nous séparait de la plaine supérieure qui domine la vallée d’une hauteur de trois cents mètres : mais un défilé praticable devait nous conduire au sommet.

À peine le camp fut-il dressé, que mes hommes m’exprimèrent le désir d’y passer la journée suivante, afin de pouvoir s’informer de la nature du pays qui s’étendait entre nous et la rivière. Ni la demande, ni le prétexte ne pouvaient être admis ; on s’était reposé la veille, et l’un des motifs que les guides m’avaient donnés pour me faire prendre la route du Malagarazi, était précisément les informations qu’ils avaient, disaient-ils, obtenues sur la contrée.

Les paroles que le général Andrew Jackson disait à un jeune homme de ses amis : « Réfléchissez bien avant de commencer une chose ; mais une fois que vous avez résolu de l’entreprendre, allez en avant et faites-la sans regarder en arrière, » m’étaient restées dans la mémoire et me traçaient la conduite que j’avais à tenir.

Dans la soirée, l’un de mes hommes blessa un buffle ; cet incident fut une nouvelle cause de dissension. La bête s’était remisée dans la jungle où, d’après le chasseur, on la trouverait morte le