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Page:Steinheil - Mes Memoires, 1912.djvu/402

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398 MES MEMOIRES

je crois, qui vint aussitôt. Le docteur partit d’un côté et moi d’un autre, après avoir pris rendez-vous... Hélas, on me vit et je fus suivie, poursuivie une fois de plus, de rue en rue, de quartier en quartier. Et ce ne fut que grâce à un embarras de voitures que nous fûmes débarrassés de ceux qui s’étaient jurés de m’arracher une interview, des déclarations... quelconques.

Quel journée que ce dimanche !... Nous allions en voiture, puis à pied, puis prenions une autre voiture. Il pleuvait à verse. Il faisait nuit quand nous retrouvâmes le docteur... Ensemble, nous passâmes par des rues étroites, peu fréquentées, et arrivâmes à un boarding-house tenu par des Allemands. J’étais épuisée, désespérée, anéantie... Tant bien que mal, je fis ma toilette. Nos bagages étaient restés à la gare. J’allai dîner, avec le docteur Mignon, chez des Français, les D..., chez qui je m’installai, après avoir passé quarante-huit heures dans le boarding-house. Le docteur partit au bout de deux ou trois jours.

En janvier, je louai une maison...

Je puis résumer ma vie, en Angleterre, en quelques mots. Je fis la connaissance de quelques amis anglais qui ne savaient pas qui j’étais, mais qui, lorsqu’ils connurent mon identité, furent plus dévoués que jamais. Je trouvai peu à peu le calme et le repos d’esprit dont j’avais tant besoin. Je rendis mon petit nid le plus beau possible, et trouvai, dans la lecture, la musique et les longues randonnées à travers la belle campagne anglaise, la consolation, l’oubli et les forces... sans lesquelles je n’aurais pas pu vivre bien longtemps.

J’ai appris à aimer l’Angleterre et les Anglais. Je les ai trouvé bien différents des gens qui fréquentaient mon salon, en ce qui concerne l’enthousiasme, l’imagination, la conversation, le goût... mais je les ai trouvé supérieurs dans d’autres qualités plus importantes. Ils sont peut-être moins spirituels et moins subtils, mais on peut compter sur eux ; ils savent peut-être moins de choses, mais ils savent bien ce