Page:Stendhal - Chroniques italiennes, I, 1929, éd. Martineau.djvu/238

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sions aux choses et aux idées qui occupaient le monde sous le pontificat de Sixte-Quint (en 1585), ne présentât pas de reflets de la belle littérature moderne, et des idées de notre siècle sans préjugés.

L’auteur inconnu du manuscrit est un personnage circonspect, il ne juge jamais un fait, ne le prépare jamais ; son affaire unique est de raconter avec vérité. Si quelquefois il est pittoresque, à son insu, c’est que, vers 1585, la vanité n’enveloppait point toutes les actions des hommes d’une auréole d’affectation ; on croyait ne pouvoir agir sur le voisin qu’en s’exprimant avec la plus grande clarté possible. Vers 1585, à l’exception des fous entretenus dans les cours, ou des poètes, personne ne songeait à être aimable par la parole. On ne disait point encore : Je mourrai aux pieds de Votre Majesté, au moment où l’on venait d’envoyer chercher des chevaux de poste pour prendre la fuite ; c’était un genre de trahison qui n’était pas inventé[1]. On parlait peu, et chacun donnait une extrême attention à ce qu’on lui disait.

Ainsi, ô lecteur bénévole ! ne cherchez point ici un style piquant, rapide, brillant de fraîches allusions aux façons de sentir à

  1. L’édition de 1855, corrige ainsi : c’était peut-être le seul genre de trahison qui ne fût pas en usage. N. D. L. É.