Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/146

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croirait utile à son salut de l’envoyer passer six mois dans le plus ennuyeux des couvents de l’Apennin.

À ce mot, Félize fut superbe de colère. Elle lui dit que les saints martyrs avaient souffert davantage de la barbarie des empereurs romains.

« Je ne suis point un empereur, madame, de même que les martyrs ne mettaient point toute la société en combustion pour avoir deux femmes de chambre de plus, en en ayant déjà cinq, aussi aimables que ces demoiselles. » Il la salua très froidement et sortit, sans lui laisser le temps de répondre et la laissant furieuse.

Le comte resta à Florence et ne retourna point dans ses terres, curieux de savoir ce qui se passait réellement au couvent de Sainte Riparata. Quelques observateurs que lui fournit la police du grand-duc, et que l’on plaça auprès du couvent et autour des immenses jardins qu’il possédait près de la porte qui conduit à Fiesole, lui eurent bientôt fait connaître tout ce qu’il désirait savoir. Rodéric L…, l’un des jeunes gens les plus riches et les plus dissipés de la ville, était l’amant de Félize, et la douce Rodelinde, son amie intime, faisait l’amour avec Lancelot P…, jeune homme qui s’était fort distingué dans les guerres que Florence avait soutenues contre Pise. Ces jeunes