Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/98

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main avait étonné son orgueil ; mais bientôt elle se jeta dans les bras de Missirilli.

— Jamais tu ne m’as semblé aussi aimable, s’écria-t-elle ; oui, mon petit chirurgien de campagne, je suis à toi pour toujours. Tu es un grand homme comme nos anciens Romains.

Toutes les idées d’avenir, toutes les tristes suggestions du bon sens disparurent ; ce fut un instant d’amour parfait. Lorsque l’on put parler raison :

— Je serai en Romagne presque aussitôt que toi, dit Vanina. Je vais me faire ordonner les bains de la Poretta. Je m’arrêterai au château que nous avons à San Nicolô, près de Forli…

— Là, je passerai ma vie avec toi ! s’écria Missirilli.

— Mon lot désormais est de tout oser, reprit Vanina avec un soupir. Je me perdrai pour toi, mais n’importe… Pourras-tu aimer une fille déshonorée ?

— N’es-tu pas ma femme, dit Missirilli, et une femme à jamais adorée ? Je saurai t’aimer et te protéger.

Il fallait que Vanina allât dans le monde. À peine eut-elle quitté Missirilli, qu’il commença à trouver sa conduite barbare.

— Qu’est-ce que la patrie ? se dit-il.