Page:Stendhal - Chroniques italiennes, Lévy, 1855.djvu/28

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Campireali que sa famille s’éteindrait avec lui, et qu’il n’aurait que deux enfans, qui tous deux périraient de mort violente. Ce fut à cause de cette prédiction qu’il ne put trouver à se marier dans le pays, et qu’il alla chercher fortune à Naples, où il eut le bonheur de trouver de grands biens et une femme capable, par son génie, de changer sa mauvaise destinée, si toutefois une telle chose eût été possible. Ce seigneur de Campireali passait pour fort honnête homme et faisait de grandes charités, mais il n’avait nul esprit, ce qui fit que peu à peu il se retira du séjour de Rome, et finit par passer presque toute l’année dans son palais d’Albano. Il s’adonnait à la culture de ses terres situées dans cette plaine si riche, qui s’étend entre la ville et la mer. Par les conseils de sa femme, il fit donner l’éducation la plus magnifique à son fils Fabio, jeune homme très fier de sa naissance, et à sa fille Hélène, qui fut un miracle de beauté, ainsi qu’on peut le voir encore par son portrait qui existe dans la collection Farnèse. Depuis que j’ai commencé à écrire son histoire, je suis allé au palais Farnèse pour considérer l’enveloppe mortelle que le ciel avait donnée à cette femme, dont la fatale destinée fit tant de bruit de son temps, et occupe même encore la mémoire des hommes. La forme de la tête est un ovale allongé, le front est très grand, les cheveux sont d’un blond foncé. L’air de sa physionomie est plutôt gai ; elle avait de grands yeux d’une expression profonde, et des sourcils châtains formant un arc parfaitement dessiné. Les lèvres sont fort minces, et l’on dirait que les contours de la